Les propositions de l’Assurance Maladie pour 2023

Chaque année, l’Assurance Maladie remet aux ministres chargés de la santé et au Parlement un rapport sur l’évolution de ses charges et de ses produits. Ce document rassemblant analyses et propositions concrètes a pour objet d’éclairer la préparation du projet de loi de financement de la Sécurité sociale, et, plus largement, des politiques de santé. Au nombre de 30 cette année, les propositions « pour améliorer la qualité du système de santé et maîtriser les dépenses » interviennent dans un contexte particulier. Marquée par les suites de la crise sanitaire, mais aussi par les tensions qui touchent le système de santé depuis plusieurs mois, la 17e édition du rapport entend en tirer les enseignements pour l’avenir.

Rapport de propositions de l’Assurance Maladie pour 2023

3 questions à Thomas Fatôme, directeur général de la Caisse nationale de l’Assurance Maladie

Question 1

Quels sont les enjeux prioritaires avez-vous travaillé dans cette éditions ?

Le rapport Charges et produits de cette année, il se situe encore dans un contexte particulier : celui de la crise sanitaire Covid qui se poursuit, et aussi celui des tensions sur le système de santé qu’on connaît ces derniers mois. Et c’est à cette aune-là qu’on a travaillé autour de trois enjeux :

Le premier, c’est l’enjeu de la santé publique et de la prévention. On a vu évidemment pendant le Covid comment ces sujets avaient pris une importance particulière, comment l’Assurance Maladie pouvait être un acteur des politiques de prévention et de santé publique et on va faire un certain nombre de propositions dans ce rapport.

Le deuxième enjeu c’est l’organisation des soins : l’accès aux soins, les déserts médicaux, l’accès au médecin traitant… beaucoup de sujets qui sont au cœur de l’actualité pour lesquels on retrouvera dans l’édition de cette année des analyses et des propositions pour libérer du temps médical et aider les acteurs dans la coopération, dans la coordination des soins.

Et puis le troisième enjeu, il est financier, on va aussi malheureusement sortir de cette crise avec un déficit de l’Assurance Maladie historique, près de 26 milliards d’euros de déficit en 2021. Ça nous invite, on pourrait même dire d’ailleurs ça nous oblige, à faire des propositions encore davantage sur l’efficience, la qualité, la pertinence des soins, la bonne prescription. On retrouvera dans cette édition toute une série de propositions à mettre en œuvre en 2023 et pour les années suivantes.

 

Question 2

Quelles sont les spécificités et les évolutions du rapport de cette année ?

Dans l’édition de cette année, on a voulu faire trois changements importants.

D’abord, enrichir le diagnostic. La cartographie médicalisée des dépenses de santé, on l’a passée maintenant sur Data pathologies, un site en data visualisation qui permet d’accéder à toutes ces données d’une façon beaucoup plus riche. On a aussi enrichi le diagnostic avec un panorama des professionnels de santé de ville. C’est quoi la démographie des infirmières ? C’est quoi les prescriptions des généralistes ? C’est quoi l’activité des chirurgiens ? Vous avez tout ça dans Charges et produits. Et puis toujours pour enrichir sur le diagnostic, on a créé un tableau de bord de la santé publique, les principaux indicateurs, les principales actions. Ça c’est la première évolution, un diagnostic enrichi.

La deuxième, c’est de se situer délibérément dans une logique pluriannuelle. Ce n’est pas qu’un rapport pour cette année, pour l’année prochaine, c’est un rapport qui nous emmène sur plusieurs années, sur l’évolution des dépenses, sur l’évolution de l’organisation du système de santé, et on se situe résolument dans cette logique pluriannuelle.

Et au service de ça, c’est la troisième évolution, c’est de construire un rapport autour de fils rouges. D’abord des fils rouges par pathologies : le diabète, l’insuffisance cardiaque. Ensuite, des fils rouges par population : les mères, les enfants, c’est quoi les enjeux de santé publique. Et puis un fil rouge autour de l’organisation des soins, et là on va regarder l’organisation territoriale. Enfin évidemment on retrouve un fil rouge qu’on avait déjà de façon historique dans le rapport Charges et produits, c’est le fil rouge autour des économies, de l’efficience, comment on pousse des mesures qui permettent d’améliorer l’efficience du système de santé.

Voilà un peu les trois évolutions majeures du rapport de cette année.

 

Question 3

Quelles sont les propositions phares de ce rapport ?

Le rapport Charges et produits de cette année, c’est 30 propositions, donc évidemment j’invite chacune et chacun à regarder dans le détail parce que ce sont des propositions très riches, très travaillées, et donc qui forment un ensemble assez cohérent. Si on essaye de regarder celles qui, peut-être, sont les plus marquantes, il y a une première série de mesures autour de l’objectif de libérer du temps médical, comment on peut aider les médecins traitants à prendre en charge davantage de patients : c’est faciliter le recrutement des assistants médicaux, c’est faciliter la construction de ces binômes médecins / infirmiers, qui permet aux médecins de gagner du temps, c’est simplifier sa vie administrative, c’est toute une série de mesures qui doivent permettre au médecin traitant de construire autour de lui une équipe qui va lui permettre de prendre en charge davantage de patients ; pas de travailler plus, mais de travailler mieux.

La deuxième mesure, elle est autour de la diminution du reste à charge. Le 100% Santé a été une formidable réussite, on a baissé le reste à charge pour les soins dentaires, pour l’optique, pour les audioprothèses. Comment on peut appliquer cette logique-là, pas forcément exactement les mêmes mesures, mais cette logique-là de baisse du reste à charge pour deux sujets importants : l’orthodontie, c’est des sujets pour lesquels il y a des restes à charge élevés pour les familles qui nous le font remonter, comment on peut travailler avec les complémentaires, avec les chirurgiens-dentistes pour baisser le reste à charge ? Et puis un deuxième sujet important, c’est celui des prothèses capillaires, notamment pour les femmes qui ont un cancer, qui nous disent là-aussi qu’elles sont exposées à des restes à charge élevés ; on doit pouvoir ensemble les diminuer.

Et puis la troisième mesure, c’est quelque part un peu une des mesures emblématiques du rapport, c’est autour de Mon espace santé et de comment on arrive à faire de Mon espace santé le vrai carnet de santé numérique des enfants. Comment on en fait un outil pour les parents, comment on en fait un outil pour les professionnels de santé qui le remplissent. On a commencé à y travailler, on n’est pas loin, et on veut vraiment faire de Mon espace santé ce carnet de santé numérique pour les parents, pour les enfants, et ça doit vraiment être une petite révolution à la fois dans la vie quotidienne des professionnels de santé et des familles.

 

Les 3 enjeux fondamentaux pour 2023

Alors que notre système de santé doit faire face à des urgences de très court terme, notamment en matière d’accès aux soins, comme à une nécessité de transformation sur le long terme, le rapport s’est tout particulièrement attaché à 3 enjeux fondamentaux :

  • la santé publique et la prévention. La crise sanitaire en a fait la démonstration : l’Assurance Maladie est un acteur majeur des politiques de prévention et de santé publique. Son action doit donc faire progresser la vaccination, les dépistages organisés des cancers, mieux accompagner les populations aux besoins les plus importants, etc. ;
  • l’organisation des soins. Les déserts médicaux, et notamment la difficulté d’accéder à un médecin traitant, constituent une problématique majeure. Le rapport fait donc une série de propositions pour libérer du temps médical et aider les acteurs dans la coordination des soins ;
  • les enjeux financiers. Proche, avant la crise, de l’équilibre financier, la branche maladie est désormais confrontée à un déficit inédit et durable. L’efficience, la qualité, la pertinence des soins sont donc au cœur de la réflexion.

Un diagnostic enrichi, une réflexion sur le long terme

Certaines évolutions notables marquent cette édition. D’abord, afin de rendre les données accessibles à tous et d’enrichir le diagnostic, la cartographie des dépenses de santé est désormais présentée en datavisualisation sur le site Data pathologies. Un panorama des professionnels de santé libéraux a par ailleurs été ajouté au rapport, ainsi qu’un tableau de bord de la santé publique, qui met en avant indicateurs et actions.

Ensuite, le rapport se situe dans une logique pluriannuelle et propose des actions à long terme, sur l’évolution des dépenses comme sur l’organisation du système de santé.

Enfin, le rapport est construit autour de 7 fils rouges. Parmi ceux-ci notamment, une approche par pathologies (insuffisance cardiaque et diabète), par groupes de population (mères, enfants), par actions pour l’organisation territoriale des soins, sans oublier une approche autour de l’efficience du système et des économies.

30 propositions : quelques exemples

Quelques exemples parmi les plus marquantes des 30 propositions à découvrir dans le rapport de propositions pour 2023 :

  • proposition 13 : « Déployer une boîte à outils pour améliorer l’accès à un médecin traitant ». Il s’agit notamment de libérer du temps médical en facilitant  le recrutement d’assistants médicaux, la construction de binômes médecins/infirmiers ou encore de libérer les médecins des tâches administratives ;
  • proposition 22 : « Poursuivre l’amélioration de l’accès financier à certains soins particulièrement coûteux pour les patients, dans le prolongement du 100 % Santé ». La mise en place du 100 % santé pour l’optique, les audioprothèses et les soins dentaires a rencontré un succès significatif. Il s’agit donc d’étendre la réduction du reste à charge à d’autres types de soins et biens médicaux : orthodontie de l’enfant, prothèses capillaires (pour les femmes en chimiothérapie), semelles orthopédiques ;
  • proposition 8 : « Faire de Mon espace santé le carnet de santé numérique de l’enfant », en adaptant ce nouvel espace sécurisé (espace assurés) aux besoins des enfants afin qu’il devienne un outil quotidien pour les parents comme pour les professionnels de santé.

Consulter les propositions de l’Assurance Maladie pour 2023. 

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